Parents, tous coupables … ou le droit de se taire …
Le droit de se taire … ou de ne pas sortir ses enfants
Eduquer des enfants c’est quand même ultra simple.
Ben oui, même la boulangère, le cousin sans enfants, la belle-mère – ou n’importe quel passant – semble toujours savoir mieux que nous, les parents, comment éduquer nos propres enfants. « Il faut…« , « y qu’à ... » et hop le tour est joué. Que celui qui n’a jamais entendu ce genre de remarques face à un comportement de son enfant me dise où il habite : je déménage dans l’instant !
Donc éduquer des enfants, c’est simple ! La preuve : tout le monde sait comment il faut faire.
Je n’ose évidemment pas mentionner les réseaux sociaux où l’exposé d’une difficulté va amener une ribambelle de jugements plus ou moins appropriés.
Donc en tant que parents, nous sommes visiblement les personnes les moins compétentes pour élever nos enfants. A se demander parfois s’il ne faudrait pas faire de l’accouchement sous X une généralité vu que nous nous y prenons tous comme des manches.
En gros, soit tes enfants sont des anges – pas une crise, pas un caprice, pas un excès, politesse extrême en toutes circonstances, jamais un mot plus haut que l’autre … – soit tu restes enfermé chez toi sans plus jamais voir personne. Pour résumer, les parents ont le droit de se taire.
Et encore ! Dans certains couples, même le conjoint sait mieux que toi comment éduquer les enfants et va te donner des conseils toutes les 3 secondes ou vous dire que tu t’y prends mal et que c’est de ta faute si les enfants se conduisent mal.
Parents, tous coupables !
Là où ça coince, c’est quand cette attitude empêche la résolution de problèmes graves.
Vous n’imaginez pas combien de parents je reçois chez moi et qui me disent : « On vient vous voir vous parce qu’on sait que vous n’allez pas nous juger. On n’ose plus en parler aux médecins, psychologues et autres professionnels de santé. Tous ceux qu’on a rencontrés jusque là nous ont dit que c’était de notre faute. »
Parfois même on n’ose pas parler de choses importantes aux gens qui s’occupent de nos enfants, de peur d’être catalogués définitivement comme des parents incompétents.
Bref, si jamais ton enfant fait un pet de travers, même minime, c’est de ta faute à toi parent, qui a forcément mal éduqué ton gosse. Donc, si tu veux vivre tranquille, vaut mieux la fermer et garder pour soi certaines choses. Parent, tu n’as qu’un droit : le droit de se taire !
Le droit de se taire, même quand ça va bien …
Face à cette culpabilisation permanente, certains choisissent de ne parler que de ce qui va bien.
Ou bien même des fois, ça se passe réellement bien (si, si, ça existe !) : la relation avec les enfants est bonne, le parent se sent compétent, les enfants vont bien, réussissent à l’école, n’ont pas de problèmes de santé, …
Super me direz-vous ? Et bien non raté. Surtout, si tout va bien : garde bien ta bouche fermée, parent !
Parce que si tu commences à dire ce qui va bien chez toi, ce que tu vas prendre dans ta face, c’est « voilà les parents parfaits qui se la pêtent et veulent nous en mettre plein la figure. ». Quand bien même tu as pris la précaution de dire « j’ai de la chance ! » pour bien montrer que tu n’étales pas ta science, mais juste que tu partages une joie du quotidien.
J’ai déjà constaté que parfois, selon notre entourage, même quand tout va bien, ça se passerait encore mieux si on faisait autrement.
Bref, encore une fois, le parent a gagné le droit de se taire …
Parents, tous coupables, une fatalité ? Comment faire disparaitre le droit de se taire ?
Déjà, arrêtons de croire que l’éducation reçue des parents conditionne entièrement le comportement d’un enfant. Si le comportement humain était aussi simplement expliqué par des liens de cause à effet linéaires, il y a belle lurette que nos problèmes auraient disparu !
Comme j’aime à le dire parfois, le comportement d’un enfant est 100% biologique (génétique, biologie, …), 100% interactionnel (éducation, façon d’entrer en relation avec lui) et 100% environnemental (contexte de vie, société, évènements vécus par l’enfant, …) et 100% comportemental (compétences acquises par l’enfant).
Réduire le comportement de l’enfant à la simple éducation que ses parents lui donnent nous fait passer complètement à côté de la complexité du problème. Et nous prive de 90% des solutions possibles. Et nous aggravons les problèmes.
Commençons aussi à sortir de ce dualisme malsain entre les « bons » et les « mauvais » parents. J’avais déjà largement abordé ce sujet ici et là. Et encore là. Penser les choses en termes de bon et mauvais est encore une réduction abusive de la réalité. Ce que je constate, c’est que TOUS LES PARENTS ont de bonnes raisons de se comporter comme ils le font. Ils n’ont pas forcément raison mais ils ont des raisons. En jugeant les comportements sans rien savoir du contexte – au sens large – qui les déclenche, nous ne faisons qu’aggraver les problèmes encore une fois.
Soyons plus réalistes et plus à l’écoute tout simplement 🙂 …
Et de grâce, cessons aussi de dire aux parents qu’ils doivent cesser de culpabiliser … La culpabilité est une émotion, pas une décision volontaire. Elle résulte d’une interaction avec un contexte donné. Elle est le signe que la personne souhaite s’insérer socialement et est consciente du risque de rejet si elle a des comportements « hors norme ». La culpabilité n’est pas une pathologie, c’est une information !
La prochaine fois qu’un parent vous parlera de ses difficultés, ou que vous en verrez une à l’oeuvre, ou qu’un parent vous parle de son plaisir d’être avec les enfants, si vous étiez simplement dans l’écoute et l’accueil de ce qu’il vit plutôt que dans le jugement ?
Et la prochaine fois qu’un parent aura un comportement qui vous choque ou vous surprend, si vous LUI demandiez simplement ce qui l’amène à agir de telle ou telle manière, par simple curiosité ? Et si vous parliez de votre expérience plutôt que de votre savoir ?
Rappelez-vous juste que le jugement en dit plus long sur celui qui juge que sur celui qui est jugé …
Cet article vous a plu ? Vous avez envie de recevoir plus d’informations à ce sujet ? Alors cliquez ici !
Pour aller plus loin
- Sur ce blog :
- Des associations qui peuvent aider pour parler des difficultés parentales
- Maman Blues
- Allo Parents bébé
- La Cause des parents (Lyon)
- et bien d’autres associations locales !
- Quelques livres
Si » tous les parents ont de bonnes raisons de se comporter comme ils le font » réfléchissent ils à ce que leurs propres parents leur ont souvent dit » les enfants , c’est ingrat »?
Maintenant que mes enfants sont devenus adultes et que mes parents sont âgés je comprends enfin ce que cette phrase veut dire. Mais les jeunes parents sauront ils entendre et comprendre ce que signifie « les enfants , c’est ingrat »
J’aimerai avoir vos témoignages, vous autres lecteurs, jeunes et moins jeunes.
Bonjour Sarah,
Votre commentaire est énigmatique et me donne envie de vous demander : que veut donc dire cette phrase pour vous ? Les enfants, c’est ingrat. Que voulez vous dire ? Pouvez vous nous donner un exemple ?
Personnellement, avec mes enfants ni petits ni grands, mes enfants « moyens » 🙂 je ne comprends pas ce que vous voulez dire. Mais je serais intéressée de le comprendre à travers votre partage. Merci d’avance.
J’ai beaucoup entendu cette phrase et je me suis aussi posée la question . Je pense que beaucoup de parents ont donné tout ce qu’ils pouvaient donner à leurs enfants ( du mieux qu’ils savaient) mais ils ne savaient pas que les besoins affectifs de leurs enfants n’étaient pas comblés. Tous ont laissé des biens en héritage , parfois conséquents, et sont morts dans l’indifférence complète des héritiers. D’où cette phrase très courue dans les campagnes: » les enfants c’est ingrat »
L’erreur est que les héritiers ont accepté cette manne sans broncher mais n’ont jamais su se relier à leurs parents.ils n’avaient sans doute pas lu » je t’en veux, je t’aime » d’Isabelle Filliozat. Pour cette raison je pense que la prise de conscience des liens entre générations devrait être plus mise en avant afin que des séquelles psychologiques ne soient pas transmises aux générations suivantes.
Je tire ceci de mes observations .
Je suis assez d’accord pour dire que les enfants c’est ingrat. Ce n’est pas un reproche que je leur fais. Mais un constat.
Le sens du mot ingrat est le suivant : « Difficile, pénible ou rebutant, qui exige de gros efforts sans résultats appréciables. » Et bien oui je persiste : les enfants c’est ingrat. Ca demande beaucoup de temps, c’est parfois difficile, voire rebutant, ça exige de gros efforts personnels aussi bien que financiers, … Et les résultats ne sont pas toujours appréciables à court terme.
Donc oui, les enfants c’est ingrat. C’est d’ailleurs quelque chose que tous les parents devraient garder en tête : on ne fait pas tous ces efforts pour que nos enfants nous en soient reconnaissants, ni pour se sentir valorisés nous les adultes. On le fait dans l’espoir que ça apporte quelque chose à l’enfant mais sans attendre de retour.
Je le dirai aussi à mes enfants quand ils seront en âge de le comprendre, que « les enfants c’est ingrat » pour qu’ils sachent bien qu’élever des enfants n’est pas toujours une partie de plaisir et qu’ils y soient préparés :-).
Bien d’accord avec vous et si j’avais des filles je les inviterai à lire » nous sommes des menteuses de mère en fille » de » lafamilledejantee.wordpress.fr » du 9 avril 2015 afin qu’elles sachent ce qui les attend…
Ping :La mère suffisamment bonne est une connasse ... - S Comm C, le blog