Ceux qui rêvent …

Licence Creative Commons - auteur Jim Champion (http://www.flickr.com/people/treehouse1977/)

Les gens qui rêvent ont la drôle de faculté de me transporter dans leurs rêves ; ils me donnent envie de rêver à mon tour, m’embarquent avec eux et j’ai envie de faire mille choses à mon tour après les avoir entendus parler. C’est comme un voyage dans lequel ils m’emmènent.

Les gens qui rêvent …

Les gens qui rêvent ont souvent mal d’être confronté à la réalité de la vie «normale», mal d’être considérés comme des anormaux, des bizarreries qui ont oublié de grandir, qui voient trop grand, trop beau, trop fort.

Ils sont comme des animaux sauvages enfermés dans un zoo qui se heurtent à leurs barreau tous les 10 pas, qui repartent dans l’autre sens et se heurtent à nouveau à leur cage 10 pas plus loin.

On leur dit et on leur fait des choses d’une violence inouïe sous prétexte de les «aider» ; on rajoute des barreaux à leur cage soi-disant pour ne pas qu’ils se blessent plus encore …

Et c’est parfois pour ça qu’ils viennent me voir pour un accompagnement …

Ils ont mal, mal de s’être si souvent brûlé les ailes aux barreaux de la normalité, aux barrières de la réalité des autres. Ils se sont si souvent cognés contre la cage que le monde leur impose qu’ils ont mal, tellement mal que, parfois, ils n’envisagent qu’une chose : mourir.
Parce qu’ils n’ont pas d’autre issue.

Et moi, que dois-je leur dire ? Que puis-je faire pour eux ?

Pour arrêter de souffrir, doivent-ils arrêter de rêver ?

Mais arrêter de rêver, c’est souffrir encore plus, c’est mourir aussi d’une autre façon, peut-être pire encore …

N’ai-je rien d’autre à leur proposer que souffrir ou souffrir ?

Et pourtant – Bon Dieu ! – que les gens qui rêvent sont riches, forts, intenses, …

Que les gens qui rêvent ont de choses à apporter, comme autant de lumières qui brillent dans la grisaille du quotidien de tous les autres.
C’est ce que j’ai envie de leur dire à chaque fois …

Mais ça ne les aide pas forcément …

Ils doivent aussi vivre dans notre monde où, quand la lumière brille trop fort, elle aveugle, elle brûle, elle fait peur. Nous ne voulons qu’une chose : la diminuer, l’éteindre, la contrôler, …
Trop de puissance, trop de force, trop de rêves, trop de tout …

La lumière doit-elle s’éteindre sous prétexte qu’elle dérange, qu’elle fait peur ?

Marianne Williamson disait :

« Notre peur la plus profonde n’est pas que nous ne sommes pas à la hauteur.
Notre peur fondamentale est que nous sommes puissants au-dela de toute limite. C’est notre propre lumière et non pas notre obscurité qui nous effraye le plus.

Nous nous posons la question : « qui suis-je, moi, pour être brillant, radieux, talentueux, merveilleux ? »

En fait, qui êtes-vous pour ne pas l’être ? Vous restreindre, vivre petit, ne rend pas service au monde. L’illumination n’est pas de vous rétrécir pour éviter d’insécuriser les autres. Elle ne se trouve non pas plus chez quelques élus mais elle est en chacun de nous.

Au fur et à mesure que nous laissons brûler notre propre lumière, nous donnons inconsciemment aux autres la permission de faire de même.

(citation que j’avais déjà publiée ici)

C’est tellement vrai … et en même temps, tellement difficile.

Quand nos rêves sont trop grands pour le monde qui nous entoure, comment vivre tout simplement ?

Et qui suis-je moi, pour accompagner ces gens-là ?

Qui suis-je pour accompagner ces gens qui rêvent si fort ?

Ces gens puissants au-delà de toute raison ?
Ces gens qui ont une force au-delà de toute commune mesure, bien au-delà de la mienne en tout cas me semble-t-il ?

Comment être à la hauteur de cette force, de cette puissance qui embarque tout, qui balaie en un regard toutes les contraintes, qui emmène si loin ?
Comment être à la hauteur de tant de rêves et d’envie ? De tant de force aussi ?

Je crois avoir assez peu de peurs.

Mais ces gens-là m’emmènent face à cette peur-là, ma plus grande peur je crois …
Oui, à ce moment-là, j’ai peur … peur d’abîmer un trésor merveilleux qui me serait confié, peur de détruire un fragile et merveilleux édifice, peur de tout foutre en l’air à vrai dire … Qui suis-je pour prétendre améliorer ce qui est déjà si beau ?

«Les thérapeutes sont des barbares qui s’aventurent dans des domaines où même les anges n’oseraient pas poser le bout de leurs ailes.» – Gregory Bateson

Oui face à ces gens-là, j’ai souvent terriblement peur d’être thérapeute …
Est-ce parce que je redeviens un ange 😀 ?

 

Et si j’avais tout simplement peur d’emprunter un chemin dont je ne sais pas où il me mène ?

 

Quelques ouvrages de Gregory Bateson :

Sandrine Donzel

Parentalité, couple, communication, développement personnel ? Votre vie ne ressemble pas à ce qui est décrit dans les livres ? Pas de panique et bienvenue dans la VRAIE VIE, celle qui est abordée sur ce blog ! Je vous y propose des outils concrets, pragmatiques et REALISTES pour répondre à vos interrogations. Bonne lecture !

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5 thoughts on “Ceux qui rêvent …

  • 18 février 2013 à 10:00
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    Beau questionnement… et aider les autres en les accompagnant vers le meilleur n’est-il pas un grand rêve, un peu fou ??
    Voici ce que je crois, très simplement. En tant qu’accompagnant, ayons la modestie de vivre notre rêve, de soutenir les rêves des autres et nos rêves entremêlés feront grandir le monde… Incarnons nos rêves, c’est notre nature même.
    Laissons la démesure prendre le volant et à notre mesure posons un pas, après l’autre, puis l’autre « Gardons de grands rêves pour ne pas les perdre de vue ».
    Une utopie devenue réalité n’en est plus une ; )
    Merci Sandrine pour la profondeur de ton approche.

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  • 18 février 2013 à 11:34
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    Bonjour Sandrine,

    J’ai côtoyé et je côtoie encore des thérapeutes, et la plus belle chose qu’ils ont pu faire pour moi, c’était de montrer leurs propres fragilités, d’évoquer leur propre façon de faire un chemin, avec des peurs, des victoires, des doutes…une humanité en somme.

    Je n’ai pas eu ce « courage » de devenir moi-même thérapeute, alors que j’empruntais ce chemin dans ma formation il y a 10 ans. La responsabilité semblait trop lourde pour moi. Et trop sérieuse sans doute. J’avais besoin de jeu, de créativité, de spontanéité, d’enfance joyeuse…

    Malgré tout, je me suis retrouvée parfois dans une position d’écoute telle, que j’ai vu des gens déposer là une émotion contenue, un mal-être caché…et j’ai accueilli comme j’ai pu.

    J’ai réalisé que vouloir faire quelque chose était le plus inapproprié…ne rien vouloir était mon travail de chaque instant…juste être là, un miroir, une présence, être moi-même.

    Ce texte de Marianne Williamson est posé là, sur le mur de ma salle de massage, comme un phare dans ma nuit…comme la lumière vers laquelle tendre, un rêve à réinventer chaque jour.

    Avec ta dernière phrase, je me demande qui est thérapeute de l’autre parfois?

    J’aime que tu partages ce que tu peux ressentir avec sincérité, merci pour ça.

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    • 23 février 2013 à 15:21
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      Mon regard est interactionnel … et donc je ne conçois pas la thérapie sans influence, dans un sens comme dans l’autre ;-).

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  • 19 février 2013 à 10:49
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    c’est si bon de rêver…
    encore un très bel article
    bravo
    Marianne

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