A quoi ça sert d’éduquer avec bienveillance ?
Eduquer avec bienveillance, est- ce un luxe de privilégiés ? Ou une nécessité pour développer chez nos enfants autre chose que la politesse, les codes sociaux ou le goût de l’effort ? Une réflexion sur l’importance d’éduquer avec bienveillance si on veut un monde plus empathique.
Commençons par une citation sur l’importance d’éduquer avec bienveillance …
« A quoi cela avancerait-il d’avoir éduqué un jeune enfant à être soigné, poli et charmant s’il est incapable de réagir devant la souffrance des autres ?
Qu’a-t-on accompli si on a élevé un enfant brillant, un premier de la classe, qui utilise son intelligence pour manipuler les autres?
Et voulons-nous des enfants tellement adaptés qu’ils sont d’accord avec une situation injuste?
Comprenez-moi bien : je ne m’oppose pas à ce qu’un enfant soit poli, soigné et instruit.
La question cruciale est pour moi la suivante :
Quelles méthodes a-t-on utilisé pour arriver à ces fins?
S’il s’agit d’insultes, d’attaques ou de menaces alors on peut être certain qu’on a aussi enseigné à cet enfant à insulter, attaquer, menacer et plier sous la menace. Si d’un autre côté, on utilise des méthodes qui sont humanisantes alors on enseigne quelque chose de beaucoup plus important qu’une série de vertus isolées.
On montre à l’enfant comment être une personne, un être humain qui peut conduire sa vie avec force et dignité »
Haim Ginott
Les mots d’Haïm Ginott sont tellement éloquents que je me suis demandée s’il était bien nécessaire d’ajouter quoi que ce soit. Et puis j’ai décidé de préciser ma pensée.
Comment les enfants apprennent ?
Pour appuyer ce que dit Haim Ginott, je ne peux que me référer à la façon dont les enfants apprennent. Et notamment leurs compétences sociales et émotionnelles.
Une grande part de ces apprentissages est fait de façon implicite, par imprégnation, en observant et en reproduisant les comportements qu’ils voient autour d’eux.
Lorsqu’un enfant voit autour de lui des adultes qui, lorsqu’ils sont en colère, crient, insultent, tapent, qu’apprend-il ? Quand il voit un adulte user – et abuser – des rapports de pouvoir et de sa position dominante par rapport à un plus faible que lui, que retient-il ?
Tout simplement que c’est comme ça qu’il faut faire.
Les enfants ont une confiance aveugle dans les adultes : si les adultes le font ou le disent, c’est que c’est vrai et que c’est comme ça qu’il faut faire.
Alors ils se comportent de la même manière … et ils se font parfois gronder parce qu’ils reproduisent ce qu’ils voient.
Ils ne comprennent plus rien, ce qui ne les met pas dans des conditions favorables pour apprendre à faire autrement.
Avec les enfants, les messages implicites sont toujours beaucoup plus puissants que les messages explicites.
Ce que vous faites crie plus fort que ce que vous dites.
Lorsque les enfants ont des comportements inadéquats ou indésirables, une des premières questions à se poser en tant qu’adulte – parent, enseignant, éducateur, assistante maternelle, … – c’est :
comment est-ce que moi je gère une situation similaire ?
Similaire ne veut pas dire identique mais simplement avec la même dynamique émotionnelle.
Par exemple : un enfant ne veut pas prêter son jouet. Est-ce que les adultes autour de lui prêtent volontiers leurs « jouets » (téléphones, ordinateurs, voitures, …) ? Si oui, ils peuvent verbaliser ce qui les y aide (« j’ai confiance dans le fait qu’on va me rendre l’objet en bon état par exemple »). Si non, ils peuvent aussi verbaliser ce qui les en empêchent (« c’est dur de prêter, j’ai trop peur qu’on abime mon objet. »).
Voilà ce qu’est montrer l’exemple pour moi : illustrer la dynamique émotionnelle, les freins, ce qui est compliqué pour moi et montrer à l’enfant comment je m’y prends pour dépasser cette difficulté.
Il ne s’agit pas de moraliser ni de penser que c’est LA bonne façon de faire mais de montrer que c’est UNE façon de faire possible.
Humiliation, chantage, menaces, … s’apprennent … de l’importance d’éduquer avec bienveillance
L’autre aspect du texte d’Haim Ginott, c’est la question de la méthode pour arriver au résultat. J’avais abordé ce sujet dans l’article « Evaluer l’éducation de nos enfants ? »
Apprendre à obéir sans réfléchir est dangereux.
Dangereux pour nos enfants à titre individuel : ils apprennent à faire une croix sur une partie d’eux-mêmes, à se nier. Ce ne sont pas les enfants que je vois le plus souvent étant enfants dans mon cabinet. Non ceux que je vois enfants, ils se rebellent, ils ne se laissent pas faire. Ils résistent. C’est dur pour leurs parents mais je suis assez rassurée pour les enfants 🙂 …
Non certains de ceux qui ont appris à obéir, je les vois ados ou adultes. Ils angoissent. Ils ont des TOCs. Ils se scarifient. Ils s’auto-punissent. Ils se soumettent à tout pour conserver une relation de couple. Bien sûr que l’éducation n’est pas la seule responsable de ces comportements mais je retrouve quand même très régulièrement des éléments d’une éducation très rigide dans l’histoire de ces jeunes (et moins jeunes … ils viennent parfois à 60 ou 70 ans).
Donc obéir sans se poser de questions est dangereux pour soi : quand obéir à un ordre implique de se renier soi-même, alors il y a un risque.
Et puis apprendre à obéir sans réfléchir est dangereux pour la société.
Tant que c’est nous qui sommes les maitres à bord, tant que nos enfants sont sous notre coupe, nous pouvons espérer que nous ne leur donnerons pas d’ordres dangereux pour la société.
Mais le jour où ils grandissent et où le maitre qu’ils respectent, ce n’est plus nous, que se passe-t-il ? Et si le « maître » qu’ils ont choisi n’était pas aussi bienveillant que nous ?
Parce que l’autorité a dit, dois-je absolument obéir ? Et si on m’ordonne de faire une chose injuste ou inacceptable, dois-je absolument obéir ?
Apprendre à désobéir à bon escient me parait primordial pour une vie d’adulte équilibrée … et apprendre à désobéir, ça s’apprend enfant en étant respecté et autorisé à avoir des opinions différentes.
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Pour aller plus loin à propos d’éducation
Sur ce blog :
Merci Sandrine !
Cela fait mouche chez moi qui protège mon dernier iPhone sans vouloir que mon petit de 18 mois y touche. Évidemment, lui aussi il veut jouer à téléphoner ! Maman lui prête le sien qui est un ancien modèle mais je suis surpris par sa « vista ». Il arrive toujours à repérer le moment où je ne fais plus attention. Alors il l’attrape et le plus souvent me l’apporte en gazouillant dedans. Peut-être qu’il me montre ainsi que « T’en fais pas papa, ton jouet je te le redonne, tu vois, juste le temps passer un coup de fil… » 😉
Ce qui fait peur, avec l’obéissance, c’est l’expérience de Milgram…
Non, je ne veux surtout pas que mes filles soient obéissantes !!!
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