Que faire quand l’autre parent me fait passer pour un méchant auprès de mon enfant ?
Après une séparation les parents deviennent parfois les pires ennemis. L’un des parents (ou les 2) peuvent tenir des propos très négatifs au sujet de l’ex-conjoint, y compris en présence l’enfant.
Etre la cible de telles critiques est très douloureux. Ca génère souvent un cocktail explosif d’émotions. Et ça ne nous conduit pas toujours à l’attitude la plus adaptée avec l’enfant, ni la plus efficace pour faire les critiques.
Voici quelques clés pour savoir que faire quand l’autre parent me fait passer pour un méchant ou une méchante.
Alors que faire quand l’autre parent nous critique alors qu’on est séparés ? ma réponse en vidéo
Pour ceux et celles qui préfèrent lire, voici le contenu de la vidéo, enrichi de différents apports et ressources :
Peur et colère nous incitent à nous défendre quand l’autre parent nous fait passer pour un méchant
La première émotion présente est souvent la peur, l’inquiétude, liées au risque pour le relation : « que va penser mon enfant de moi ? », « comment éviter que mon enfant me rejette si on lui parle négativement de moi ?« , « comment construire une relation avec mon enfant si mes efforts sont par ailleurs sabotés ?«
Ces inquiétudes sont légitimes. Elles nous invitent à détromper l’enfant, à tenter de lui montrer que l’autre parent ne dit pas forcément la vérité et qu’il existe d’autres façons de voir les choses. On veut le protéger d’un parent potentiellement manipulateur.
Et je suis 100% d’accord pour dire que ce message est utile …
Les tentatives pour le faire passer, motivées par l’inquiétude, sont renforcées par la colère et le sentiment d’injustice : « ce n’est pas juste de parler comme ça de moi à mon enfant« , « ce n’est pas juste de me traiter comme ça« .
C’est souvent là que les ennuis commencent …
Contredire l’autre parent quand on est critiqué, oui. Mais il y a des risques
Le problème ne réside pas dans l’intention louable de faire passer un autre message. Il est dans la manière dont on va s’y prendre pour le faire, et dans l’escalade relationnelle qui peut s’ensuivre et dont l’enfant est la 1e victime.
On veut s’expliquer, nuancer le propos, se défendre.
On veut surtout se rassurer et rectifier l’injustice : l’enfant a-t-il bien compris que nous ne sommes pas le vilain parent pour lequel on veut nous faire passer ?
Le risque majeur ici, c’est le conflit de loyauté.
Dans les faits, l’enfant se retrouve tiraillé entre ses 2 parents.
Chacun attend de lui qu’il valide sa version des faits.
Mais pour l’enfant, il ne s’agit pas simplement d’évaluer. Confirmer la version de papa ou de maman, c’est choisir l’un ou l’autre.
« quand papa a tort, maman a raison ; quand maman a tort, papa a raison«
Demander à l’enfant de prendre parti entre ses 2 parents, c’est comme lui demander de choisir entre sa jambe droite et sa jambe gauche. Ou entre son coeur et ses poumons.
Si l’attitude et les réponses de l’enfant et de l’ex ne nous rassurent, on peut avoir tendance à en rajouter dans les tentatives de convaincre son enfant.
Ce qui évidemment ne réduit pas le tiraillement chez l’enfant.
Et je crois vraiment que ce conflit de loyauté est la pire chose qu’on puisse faire vivre à un enfant.
(à noter que c’est la même chose quand un-e professionnel-le de l’enfance – assistante maternelle, personnel de crèche, animateur ou animatrice, professeur-e, etc – émet des critiques sur l’attitude des parents en présence de l’enfant)
Bon alors on fait comment pour réagir aux critiques de l’ex ?
Première action possible : parlez au parent critique
Quand les enfants sont petits, c’est la 1e chose à faire. Les propos en question ne sont pas forcément malveillants. Ils peuvent avoir été dits sous le coup de la colère et de l’agacement.
Si la relation n’est pas trop dégradée, on peut en parler à l’autre parent. Si les propos ont été tenus sous le coup de la colère, c’est à vous que celle-ci devrait être adressée, et non à l’enfant.
Attention ici il y a des manières d’accueillir le ressentiment de l’autre qui apaisent et d’autres qui font flamber la colère ! (si vous ne savez pas quel est le plus efficace, n’hésitez pas à vous faire aider)
Une personne bien intentionnée mais très en colère contre vous peut continuer à avoir des propos déplacés si vous ne recevez pas sa colère de manière adéquate.
Autre point : si le papa ou la maman critique est mal intentionné-e voire toxique (ça peut arriver), vous aurez sans doute besoin d’apprendre à être plus stratégique dans vos réactions, aussi bien auprès de l’enfant que de l’autre parent. Là aussi une aide peut être nécessaire.
Deuxième action indispensable : la relation avec l’enfant
Vous pouvez évidemment rectifier les propos tenus et donner votre point de vue. Si vous choisissez de le faire, faites-le de manière brève, en quelques phrases.
L’idée clé est d’assumer sans vous défendre ni minimiser ou dénigrer ce que l’autre parent vit.
« oui c’est moi qui ai décidé de partir. Je sais que c’est difficile pour tout le monde, mais je l’ai fait parce que je pense vraiment qu’on ira tous mieux après ça«
« Parfois on fait des choses blessantes, mais ça ne veut pas forcément dire qu’on est méchant. Je sais que j’ai fait des choses qui peuvent rendre ton papa ou ta maman très triste et très en colère et j’en suis vraiment désolé-e.«
« Chez moi tu n’as pas le droit à X (jeux, écrans, dormir avec le parent). Je le fais parce que c’est comme ça que moi je veux faire. Ca te parait peut-être injuste, et tu as le droit de me le faire savoir. On pourra en reparler si tu veux. «
Mais il est aussi très important de vérifier comment l’enfant vit les choses et quelle est sa demande.
En effet, il arrive fréquemment que l’enfant nous parle de certaines choses non pas parce qu’il en souffre ou qu’il essaie de tirer profit de la situation … Mais tout simplement parce qu’il croit que c’est ce que nous attendons de lui.
C’est particulièrement vrai s’il voit que ça nous touche. Notre réaction lui dit « c’est important pour papa ou pour maman, donc il faut lui en parler. »
On peut lui poser la question directement : « quand papa/maman te dit ça, tu en penses quoi ? Tu es un peu d’accord, pas du tout d’accord, beaucoup d’accord ? ». Cela permet d’avoir une amorce de discussion ensuite. On pourra alors donner notre point de vue, là encore SANS INSISTANCE.
On peut aussi vérifier quelle est la demande de l’enfant : « quand tu me dis ça, qu’attends-tu de moi exactement ?«
A noter que les enfants les plus petits ne vont pas rapporter les propos. Si le parent en a connaissance, ça peut être via une tierce personne ou lors des moments de transition.
Il est alors utile de prendre le temps de vérifier quel impact ces propos ont vraiment sur l’enfant : dégradent-ils la relation ? Que fait l’enfant qui le traduit ? Il se peut que, pour l’enfant ça ne soit pas si grave que ça, surtout si par ailleurs notre relation avec eux est bonne.
Pour diminuer le tiraillement chez l’enfant, l’autoriser à ne PAS parler de ce qui se passe et se dit chez l’autre parent est souvent utile.
« Tu sais quand on a 2 maisons, on n’est pas obligés de tout se dire. Parfois, c’est plus simple de garder des choses pour chaque maison. Ca évite à tout le monde de souffrir. Evidemment si vraiment quelque chose est difficile pour toi, tu peux m’en parler et on essaiera de voir quelle est la meilleure manière de gérer le problème. «
Attention : il est important de ne pas non plus interdire de parler de ce qui se passe de l’autre côté, ça pourrait être dangereux pour l’enfant.
En résumé, les 3 points clés pour savoir que faire quand l’autre parent nous fait passer pour un méchant
- faire confiance à l’enfant : il n’a pas besoin d’être tiré vers vous, même si l’autre parent est dans la manipulation. Au contraire ! En grandissant, – et tout particulièrement si vous cultivez avec lui une relation de qualité, l’enfant a de fortes chances de savoir reconnaitre quelle est la relation qui le respecte
- Assumer votre point de vue sans vous justifier ou vous défendre et encore moins en critiquant l’autre
- cultivez une relation de qualité avec votre enfant sans comparer avec l’autre parent
Mais pour cela, il faut renoncer au besoin de rétablir une vision plus objective des choses. (ou une vision plus proche de votre point de vue selon les cas)
Cela suppose aussi de prendre le risque que l’enfant soit influencé par l’autre parent. Les attitudes proposées font le pari que l’enfant saura faire la part des choses.
Et rien de tout cela n’est facile.
Pour aller plus loin sur les situations de famille recomposées ou de séparation, des ressources complémentaires :
- Sur ce blog :
- L’épisode de podcast de mes collègues de Virages qui vous apportera beaucoup de pistes complémentaires : « mon ex me critique face aux enfants »
Les situations de séparation peuvent être compliquées émotionnellement. Si c’est le cas pour vous, n’hésitez pas à solliciter une aide professionnelle.
Je reçois régulièrement des parents séparés pour les aider à trouver comment gérer la relation avec leur ex et/ou leurs enfants de manière très concrète et très spécifique à LEUR situation. Il m’arrive aussi de recevoir des couples séparés ou en cours de séparation pour les aider à trouver le mode de fonctionnement et de communication qui met de l’huile dans les rouages.
Je reçois en visio ou en présentiel (à Aoste – nord Isère).
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Cet article me parle particulièrement.
C’est un jonglage permanent et parfois ça remue l’estomac très fort, mais le principal est de consolider la relation avec mon fils ici et maintenant.
Oui, émotionnellement ça peut être difficile. C’est là où les parents ont parfois besoin d’aide effectivement, quand l’émotion est trop forte.
Bonjour, votre article est très intéressant. Je suis face à une problématique similaire mais concernant mes parents et donc les grands parents de ma fille.
Depuis ma séparation nos relations se sont dégradées, ou plutôt les problèmes liés à notre relation ont ressurgis. Mes parents ont reçu mon ex conjoint à dîner, ce qui dans le contexte de tension que je vis avec mes parents est compliqué. Ma fille (11 ans) m’en a parlé et m’a dit que ça lui avait fait bizarre car je n’étais pas là. ils avaient déjà invité mon ex conjoint auparavant mais cette fois ci j’ai pris mon courage et j’ai demandé à mes parents de ne plus inviter mon ex conjoint afin de préserver une bonne relation avec moi et je leur ai fait part du fait que c’était compliqué pour ma fille et moi. Ils se sont opposés à cette idée disant que ce n’est pas moi « qui allait décider de ce qu’ils devaient faire ». Ma fille a été cet été chez eux en vacances et elle est revenue en colère et mal car selon ce qu’elle m’a dit ils lui avaient dit du mal de moi et ça l’avait fait pleurer. Je leur ai écrit une lettre en utilisant la méthode desc pour leur demander de ne plus dire de choses me concernant qui pourrait blesser ma fille. Ils ne m’ont pas réécris depuis et je n’ai plus eu de nouvelles d’eux mais ils ont appelé ma fille lorsque était chez son père. J’avoue que j’aurais préféré ne pas le savoir. Je ne sais comment sortir de cette situation, que ma fille et moi même soyons respectées et qu’elle ne se retrouve pas dans un conflit de loyauté. Je sais que mes parents adoraient mon ex conjoint et m’en veulent beaucoup de la séparation. Mon père l’a quasiment exprimé en ces termes. Mais cela fait 6 ans maintenant.
Je vous remercie pour vos conseils.
Bien cordialement
Merci pour votre témoignage. Vous avez déjà posé des limites claires avec vos parents, et c’est une démarche importante.
Hélas s’ils décident de ne pas changer, vous ne pouvez pas y faire grand chose. A ce stade, vous pouvez choisir de continuer à insister si vous avez l’espoir que vous pourrez finir par les convaincre mais en étant consciente que vous prenez le risque d’être encore plus déçue et en colère à chaque tentative infructueuse.
Pour votre fille, vous ne pouvez pas non plus changer vos parents, ni les empêcher de dire ce qu’ils veulent devant votre fille. Mais vous pouvez la libérer de votre côté du conflit de loyauté : ses grands parents vont continuer à dire des choses désagréables sur vous devant elle. C’est très injuste et très désagréable à entendre. Mais ni vous, ni elle n’y pouvez rien changer. Et essayer de les faire changer sans succès ne risque que de vous apporter à elle et à vous que davantage de sentiment d’injustice et de colère et vous allez devoir faire avec ses grands parents tels qu’ils sont. Sachant cela, comment envisage-t-elle l’avenir de sa relation avec ses grands parents ? Est-elle OK pour continuer à aller les voir, peut-être moins longtemps ? A-t-elle besoin d’aide quand elle est en colère face à leurs propos (pour gérer cette colère) ?