Pourquoi je ne propose pas d’activités quand les enfants s’ennuient
Les vacances scolaires approchent. Avec elles arrivent des moments en famille, des sorties, … et aussi l’ennui. Car vous l’aurez remarqué, les enfants finissent généralement par s’ennuyer pendant les vacances scolaires (sauf si vous avez de très gros moyens et/ou une disponibilité surhumaine). Comment réagir quand les enfants s’ennuient ?
Le problème, ce n’est pas l’ennui …
L’ennui des enfants n’est pas un problème en lui-même. Au contraire ! L’ennui contribue et participe à un bon fonctionnement du cerveau. Nous avons besoin de temps sans rien faire et surtout sans activité mentale dirigée. NOTRE CERVEAU a besoin de s’ennuyer. Cela lui apprend à mieux tolérer nos pensées et leurs divagations incontrôlables ; cela favorise la créativité (ce n’est pas le seul ingrédient mais ça y contribue). Bref, s’ennuyer a d’ENORMES AVANTAGES.
Nous avons d’ailleurs beaucoup trop d’activités dirigées. C’est encore pire pour nos enfants : combien de minutes par semaine peuvent-ils se livrer à une activité NON ENCADREE et NON DIRIGEE par un adulte ? Je veux dire : sans ADULTE pour leur dire quoi faire ni comment le faire, sans ADULTE pour leur rappeler si besoin qu’ils doivent se comporter plutôt comme ci ou plutôt comme ça ? Je suis prête à parier que ce temps est proche de ZERO.
Alors oui, l’ennui est une chose formidable pour notre cerveau et notre développement (je mets les adultes dans le même sac). Pourtant personne n’a l’air d’en être convaincu …
Le problème avec l’ennui, c’est que notre cerveau n’aime pas ça …
Et c’est tout à fait logique : s’ennuyer ce n’est pas très agréable. On peut même qualifier l’effet produit sur nous de punitif (au sens comportementaliste du terme).
Note : au sens comportementaliste, une punition est simplement un effet désagréable (ou aversif) entourant un comportement. Si je ressens de l’insatisfaction pendant ou après une activité, c’est punitif. J’aurai alors spontanément tendance à tenter d’éviter cette activité.
Notre cerveau aime résoudre des problèmes et chercher des solutions. C’est même sa fonction principale, une de ses raisons d’être fondamentales. Quand il n’a rien à faire, c’est très gênant pour lui. Il mouline alors dans le vide et nous envoie des tas de signaux désagréables pour nous inciter à « faire quelque chose » : des sensations physiques désagréables, des tas de pensée qui s’enchainent les unes après les autres, etc, etc.
Des études sur le sujet montrent même que nous préférerons nous faire mal plutôt que de nous ennuyer : placez un sujet dans une pièce neutre, sans activité possible (personne, pas de livre, pas d’écran) en lui demandant de rester assis pendant 30 mn. Le seul objet laissé à sa disposition est un buzzer qui envoie des décharges électriques quand on l’utilise. Le sujet a testé le buzzer AVANT d’être placé dans la salle. Il a eu mal et exprimé clairement qu’il ne souhaitait absolument pas réitérer l’expérience car elle est très douloureuse. Au bout de moins de 10 minutes d’ennui, le sujet va préférer prendre une décharge que rester seul à ne rien faire. Cette expérience (et d’autres) sur l’ennui est très bien décrite dans cette vidéo.
Victimes de trop d’ennui, nous allons cogiter, nous agiter, manifester notre inconfort.
Le cerveau n’aime pas l’ennui … et nos enfants nous le font bruyamment savoir !
Et c’est bien là que le bât blesse pour les parents : si les enfants s’ennuient, vous allez rapidement le savoir.
Si votre enfant s’ennuie sans rien dire, il y a fort à parier que vous n’êtes pas en train de lire cet article. Malheureusement, la majorité des enfants (et des adultes) qui s’ennuient manifestent plutôt bruyamment leur ennui : ils soupirent, ils se plaignent, ils râlent, etc.
Dans ces moments-là, les enfants vous demandent d’intervenir pour supprimer l’inconfort lié à l’ennui. Ils vous demandent tout simplement de résoudre le problème à leur place.
Avec le temps, cela devient insupportable : nous aimerions bien qu’ils développent leur autonomie (« ils ne vont quand même pas nous demander des activités jusqu’à 25 ans !!!« ). Et surtout nous aimerions bien, nous, retrouver un peu de temps pour nous ennuyer (je me rends compte en écrivant ce passage que le vrai problème des parents, c’est précisément celui-là : nous n’avons plus une seule minute pour nous emmerder en paix !!!).
Proposer des activités à un enfant qui s’ennuie est un bon moyen d’aggraver son ennui
Trouver un moyen de sortir nos enfants de l’ennui devient donc crucial !
Mais comment se sort-on de l’ennui ? D’abord en apprenant à vivre avec ! Si, à chaque fois que je m’ennuie, quelqu’un me propose une activité, je reçois le message : « l’ennui est une mauvaise chose ». Il deviendra donc de plus en plus aversif et de plus en plus problématique. Je vais donc manifester de plus en plus bruyamment mon inconfort – voire ma panique – face aux temps d’ennui.
D’autre part, proposer des ressources extérieures (le parent dit quoi faire) envoie implicitement le message « tu ne peux te sortir de là tout seul« .
La fois suivante, je vais réclamer de l’aide à la personne extérieure. Si jamais cette personne fait défaut (elle n’est pas disponible, elle m’envoie sur les roses parce qu’elle en a ras le bol), le problème s’aggrave. Je peux alors devenir aggressive ou méchante ou insupportable ! (toute ressemblance avec une situation vécue à la maison est hautement probable).
Evidemment, c’est la répétition qui va ancrer tel ou tel message. Si une fois de temps en temps vous proposez des activités et que ça fonctionne, ne changez rien 😀 !!! Si par contre, vous rencontrez régulièrement des difficultés quand vos enfants s’ennuient
Pour toutes ces raisons, je n’utilise pas le fameux « bocal à activités » à la maison. Son seul et unique avantage est de déléguer au bocal la tâche de répondre aux enfants. Cela épargne donc un peu de temps et d’énergie aux parents (ça peut être bon à prendre). Mais il ne permet pas de résoudre le problème de fond. En réalité, il ne fait qu’aggraver le stress des enfants face à la prochaine situation d’ennui.
Comment cesser d’envoyer un message négatif à propos de l’ennui ?
D’abord et avant tout en légitimant l’inconfort lié à l’ennui. Oui c’est embêtant. Ca peut même être carrément douloureux. C’est simplement la REALITE physique et mentale de l’ennui. Nous évitons souvent de dire à quel point s’ennuyer est difficile à vivre par peur d’aggraver l’inconfort de nos enfants (et donc leurs demandes auprès de nous !!!). Pourtant, c’est l’inverse qui se produit : se sentir complètement reconnu et rejoint dans ce qu’on vit soulage. Si vous sautez cette étape, votre enfant aura moins de ressources pour essayer de surmonter l’épreuve.
Vous pouvez éventuellement leur expliquer en quoi l’ennui est une chose formidable, en faisant un peu de pédagogie sur le fonctionnement du cerveau. Mais surtout NE LE FAITES PAS AU MOMENT OU ILS S’ENNUIENT :-D. Sinon ils ne vous écouteront pas (voir la vidéo sur les explications et les enfants par ici).
Ensuite (mais il faut ABSOLUMENT avoir fait la 1e étape pour que ça aie une chance de fonctionner), en assumant de NE PAS PROPOSER DE SOLUTIONS. Avouer son impuissance est très puissant : l’enfant va alors cesser de chercher auprès de nous des solutions et se recentrer sur ses ressources internes. Cela lui envoie le message très positif : « tu es capable de gérer ce problème ! »
Enfin, il va vous falloir avoir les nerfs bien accrochés au début. Pourquoi ? Et bien pour surmonter la résistance de vos enfants à ce changement d’attitude :-D. Jusqu’à maintenant, ils étaient sans doute habitués à vos réponses. Lorsque vous cessez de répondre, leur cerveau se voit privé d’une ressource sur laquelle il pouvait compter. C’est alors le branle-bas de combat intérieur. Colère, agacement, inquiétude se mélangent à l’intérieur. Et à l’extérieur, il devient agressif … Vous allez donc devoir accepter les manifestations désagréables sans (trop) réagir négativement, le temps que leur cerveau s’habitue.
Quand les enfants s’ennuient, des ressources complémentaires
Sur ce blog :
- 2 situations où je décris une attitude similaire à celle proposée dans ce article :
- avec un enfant de 4 ans qui n’a plus de slip dans son placard et s’en plaint : « Le drame international du slip manquant«
- avec des ados qui n’aiment pas l’activité proposée : comment gérer l’enfant ou l’ado râleur ?
- D’autres articles :
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