Allo Docteur ?
Aujourd’hui me voilà avec une anecdote personnelle qui illustre bien ce qui se passe quand on n’écoute pas les gens … ou qu’ils ne se sentent pas écoutés …
Je précise – des fois que des médecins qui liraient ce billet se sentent attaqués, mis en cause – qu’il ne s’agit pas pour moi de faire une généralité autour des médecins car ceux que je côtoie habituellement ne m’ont pas habituées à ce genre de comportement, qu’ils sont pour la plupart suffisamment à l’écoute pour entendre ce que je dis – ou en tout cas pour me le faire croire 😉 …
Donc voilà mon histoire : je me traine une angine depuis plusieurs jours et malgré une visite chez le doc hier matin et des tonnes de médocs – uniquement anti-douleurs puisque le test du strepto était négatif- la douleur n’a fait qu’empirer jusqu’à hier soir où j’en étais au point d’avoir des nausées lorsque je parlais à cause de la gêne dans ma gorge.
Et hier soir un drôle d’évènement m’est arrivé : un truc a comme «lâché» soudainement dans ma gorge, un drôle de sensation, puis un truc qui coule … et le soulagement immédiat : quasiment plus aucune gêne dans la gorge et des témoins autour de moi pour attester que ma voix a brutalement changé.
J’ai supposé – peut-être à tort ? – que j’avais peut-être eu un abcès qui s’est percé tout seul.
Je laisse passer la nuit et je décide de téléphoner aux urgences médicales de mon département ce matin pour avoir un conseil sur la conduite à tenir : dois-je aller consulter aujourd’hui – un médecin ou des urgences hospitalières – pour vérifier que tout est bien drainé et OK dans ma gorge ? Puis-je faire quelque chose en attendant (antiseptique local) ? Est-ce que ça peut attendre demain ?
Bref, j’appelle donc les Urgences Médicales de mon département, un numéro qui est clairement présenté comme un numéro d’appel pour avoir un avis médical en-dehors des heures d’ouverture des cabinets médicaux et prendre une décision avec l’aide d’un médecin, exactement ce que je cherche …
Et là … douche froide …
Je vous mets ici à la fois les éléments de la discussion, mes pensées intérieures au moment dit et mes sentiments pour que vous compreniez bien ce qui se joue quand on essaie de convaincre quelqu’un qu’il a tort …
La discussion donne à peu près :
– Bonjour madame. Pourquoi appelez-vous ?
– Alors voilà, j’avais une angine qui traine depuis plusieurs jours. J’ai vu mon doc hier matin qui m’a fait un test pour le streptocoque qui était négatif et elle m’a donc prescrit uniquement des anti-douleurs mais la douleur n’a fait qu’empirer au cours de la journée d’hier et il s’est passé quelque chose de bizarre hier soir et je voulais savoir …
– Oui, bon vous avez une angine. Vous devez prendre des antibiotiques. Vous en avez chez vous ?
– (heu et le test qui dit que c’est pas une angine bactérienne, il sert à quoi alors ? et pis c’est pas pour ça que j’appelle en fait, j’ai pas fini là ! = je ne me sens pas du tout écoutée, j’ai l’impression qu’il n’en a rien à faire de ce que je lui dis) … heu non, je n’ai pas d’antibios chez moi … mais heu … en fait il y a autre chose, c’est pour ça que j’appelle.
– OK, faites court alors !
– (OK d’accord, tu as fait ton diagnostic et tu n’as pas envie de m’écouter = je suis énervée car j’ai l’impression qu’il n’a pas envie de me parler) … bon alors hier soir, la douleur a empiré. J’avais envie de vomir au bout de 3 phrases quand je parlais. Et d’un seul coup, j’ai senti un truc «lâcher» dans ma gorge, quelque chose qui coule et j’ai été immédiatement soulagée de la tension et de la douleur, je pouvais parler et avaler normalement … Donc j’ai pensé que j’avais peut-être un abcès qui s’était percé tout seul et je voulais savoir …
– Ce n’est pas possible ce que vous dites ! Ce que vous avez senti c’est surement un bout de peau qui s’est détaché ! Vous avez de la fièvre ? vous avez mal à la gorge ?
– (OK, prends-moi pour une andouille qui ne sait pas ce qu’elle sent = je me sens de moins en moins écoutée mais ça m’énerve tellement que j’ai envie de lui faire entendre mon point de vue) … heu ben non, là je n’ai plus mal et plus mal à la gorge. Justement depuis hier soir … et je voulais savoir, au cas où c’est un abcès, ce que je dois faire : vérifier qu’il s’est complètement drainé ou autre …
– Mais enfin, ce n’est pas possible ce que vous racontez !!! C’est de la guérison spontanée alors ? C’est n’importe quoi …
– (OK pauvre C**, tu as visiblement décidé que j’étais une hystérique = je suis découragée, je laisse tomber) … bon tant pis, je vais attendre, j’appelerai mon médecin demain matin … au revoir !
Et encore j’ai écourté la discussion de quelques phrases car à un moment donné, je lui ai demandé de m’écouter jusqu’au bout pour que je puisse lui donner toutes les informations car il me coupait la parole à tout bout de champ …
Je trouve que cette discussion est un «chouette» modèle de non-écoute : tout au long, à aucun moment, je n’ai senti que la personne en face de moi avait envie de m’écouter, qu’elle voulait absolument m’imposer son opinion et ne souhaitait pas tenir compte de ce que je lui disais.
Je ne me sentais pas respectée, pas entendue, j’avais juste envie de lui raccrocher au nez …
Et la distance, l’hostilité entre nous s’est construire au fur et à mesure de la conversation.
Au départ, je n’étais absolument pas hostile à ce médecin, j’attendais son aide au contraire, ma résistance à ses propos n’était pas en moi, elle s’est construire et développée au fur et à mesure de la conversation …
«il n’y a pas de patients résistants, il n’y a que des thérapeutes maladroits ou trop pressés»
(désolée je ne me souviens plus de l’auteur de cette chouette citation !)
Pour moi c’était une belle illustration aussi de la citation d’Einstein :
«si la théorie ne correspond pas aux faits, changez les faits»
😉 …
C’est exactement ce que j’avais l’impression que ce médecin faisait : il avait fait son diagnostic au bout de ma 2e phrase et n’avait juste pas envie que je lui raconte autre chose, comme s’il supprimait les faits.
Il n’a tenu aucun compte de mes informations, les a balayées d’un revers de main comme si elles étaient injustifiées, inappropriées
C’était très difficile à vivre pour moi, je bouillais intérieurement, alors même que je pouvais concevoir que ce n’était peut-être pas un abcès mais que dans ce cas, j’avais besoin d’explications sur ce que j’avais vécu – et que je n’avais pas inventé puisque les personnes présentes ont constaté le changement de ma voie, le désenflement quasi immédiat de ma gorge côté droit …
En tant que patiente, j’avais besoin que ce médecin m’écoute et réponde à mes questions …
Pas qu’il me traite comme une gamine écervelée …
Ce n’était peut-être pas un bon jour pour lui, pas un bon moment, peut-être est-il différent d’habitude, peut-être ai-je fait quelque chose qui ne lui a pas plu …
Mais là, franchement, je n’ai plus du tout envie d’appeler ce numéro d’urgences, je trouverai une autre solution la prochaine fois en cas de besoin …
Et je repars surtout avec toutes mes questions, qui attendront demain, en espérant que ça ne jouera pas sur ma santé future :-/ …
Donc quand quelqu’un se confie à vous, même si vous n’étes pas médecin, pense à cette situation … et rappelez-vous que ce que la personne ressent est une réalité pour elle, que le nier ou le rejeter ne fera que faire grandir l’incompréhension entre vous …