Peut-on faire de l’humour avec les enfants ?
Vous avez peut-être vu passer quelques petits 🐟 dimanche, 1er avril oblige. Une belle occasion de faire des bricolages avec les enfants … mais aussi de bonnes – ou moins bonnes – blagues à son entourage. Lara m’a donc soufflé l’idée de vous parler du sujet en me demandant si on pouvait faire de l’humour avec les enfants … J’ai donc décidé de vous faire un article pas du tout humoristique sur le sujet 🙂 !
Faire de l’humour avec les enfants est parfois tentant …
D’abord face à leur candeur … Les plus petits peuvent facilement se laisser piéger là où les adultes
auraient débusqué votre jeu. Il est donc facile de leur faire des « blagues » …
Ensuite face à certaines situations difficiles … Il est tentant d’utiliser l’humour noir par dépit et impuissance. Une espèce de tentative de la dernière chance pour faire réagir l’enfant. Mais ironie, sarcasme, cynisme, … ne sont souvent pas de bons moyens de résoudre les problèmes.
Dans la relation à l’enfant, l’humour peut poser problème pour pleins de raisons (que je détaille plus bas). Alors humour ou pas humour avec les enfants ?
Faire de l’humour avec les enfants : quelques formes d’humour fréquemment utilisées avec les enfants
L’humour burlesque : c’est un humour sans message caché, de premier degré. Il est souvent basé sur des exagérations et fait rire en mélangeant distingué et vulgaire (pets, rots, …). Il peut aussi être basé sur des « accidents » – chûtes, coups exagérés, … – dont on comprend vite qu’ils sont « pour de faux ». Les enfants sont très rapidement sensibles à cet humour très clownesque.
La raillerie : c’est une moquerie claire et évidente d’une personne : « tu es tellement bête que si on te disait d’aller chercher de l’eau avec un panier, tu irais » est une raillerie.
L’ironie : c’est dire le contraire de ce qu’on pense, avec un ton qui fait clairement comprendre qu’on pense le contraire. « Et bien bravo !!!! » sur un air fâché fait partie de l’ironie. Le vrai message est porté par le non-verbal (les gestes et attitudes) et le para-verbal (le ton employé). Les mots semblent contradictoires. L’ironie est là aussi relativement vite comprise par la plupart des enfants. Attention les enfants présentant des troubles du comportement peuvent avoir du mal à prendre en compte l’ensemble des signaux
Le sarcasme : C’est dire le contraire de ce qu’on pense, avec un non-verbal et un para-verbal cohérent avec les mots. L’analyse du contexte et d’autres interactions amène à comprendre ce que la personne veut réellement dire. Un exemple de sarcasme : un enfant demande à manger quelques minutes avant le repas. L’adulte lui répond « mais oui, bien sûr ! » avec le sourire.
Faire de l’humour avec les enfants : à quel âge ?
L’humour suppose une très bonne compréhension des mécanismes de la communication. Il est nécessaire de comprendre les contradictions entre le message explicite (les mots) et le message implicite (tout le reste). Il y a bien d’autres niveaux dans la communication et tous entrent en jeu dans l’humour (mais ce serait un peu long pour cet article !).
Comprendre l’humour suppose de maitriser de (très) nombreux codes et d’être attentif à de (encore plus nombreux) détails. C’est cela qui est difficilement accessible aux enfants !
L’humour burlesque est facilement accessible aux tous petits. Ils rient de bon coeur face au clown qui se prend les pieds dans le tapis ou au rôt qui échappe à leur voisin de table. Les jeux de mots et autres plaisanteries leur deviennent accessibles avec le développement du langage et du vocabulaire.
L’humour burlesque est aussi très utile pour dédramatiser votre propre énervement et le mettre à distance. En faisant crier un objet ou une marionnette, vous tournez votre énervement au ridicule. L’enfant se sentant moins agressé, il entend mieux votre message.
Marine Paris, une artiste qui nous lit régulièrement, nous a fait parvenir cette vidéo pour montrer comment elle s’y prenait avec son fils vers ses 2/3 ans pour l’aider à faire ses taches quotidiennes (s’habiller, mettre ses chaussures) :
Une vidéo à voir ici : https://www.facebook.com/SandrineDonzelSCommC/videos/1112285368795594/
Donner un âge est extrêmement difficile car cela dépend de la culture familiale et du type d’humour qui est – fréquemment ou non – employé.
Les enfants comprennent assez rapidement l’ironie (voir définition plus haut) : ils sont souvent plus attentifs au non-verbal et au paraverbal qu’aux mots. Ils identifient donc assez facilement le vrai message, même s’il est un peu masqué. Le sarcasme, lui, est beaucoup plus problématique : le comprendre nécessite l’intégration de nombreux paramètres qui sont peu accessibles aux enfants avant un âge assez avancé.
Pour faire de l’humour avec les enfants, les familiariser avec différentes formes d’humour est une bonne idée. Leur expliquer certains codes (pas trop sinon ça casse le jeu 🙂 les aide à comprendre et à intégrer les règles de l’humour dans leurs relations.
L’humour est un excellent outil pour rire ensemble, dédramatiser des situations compliquées, faire passer des messages un peu délicats.
Je l’utilise d’ailleurs souvent dans mes accompagnements, y compris pour des situations très douloureuses. Utiliser l’humour demande cependant quelques précautions …
Faire de l’humour avec les enfants, quel est le problème ?
L’humour est censé faire rire les 2 personnes concernées. L’humour suppose la connivence : on rit ensemble. Si l’un des 2 ne rit pas, ce n’est pas de l’humour.
Si votre intention n’est pas de faire rire l’autre, laissez tomber l’humour (ou réservez votre humour à votre belle-mère ou à n’importe qui d’autre que vous détestez !)
Quand un enfant se fait mal et pleure, dire « j’appelle les pompiers tout de suite ou tu préfères que j’attende un peu ? » peut aider l’enfant à dédramatiser en douceur. Il s’agit à la fois de reconnaitre sa sensation tout en l’amenant à prendre du recul sur celle-ci.
Attention, si vous avez envie de vous moquer de votre enfant, ça ne marchera pas : votre enfant sentira votre intention de le blesser et va hurler de plus belle.
Si votre intention est bonne, votre enfant peut malgré tout ne pas comprendre. Vous pouvez lui expliquer après coup tout simplement et éventuellement convenir d’un signal qui dira « attention je tente l’humour« , le temps qu’il intègre les codes et comprenne de lui-même.
De plus, l’humour peut être très manipulatoire : comment dire que la situation ne nous convient pas si toute velléité de l’exprimer se termine en « tu n’as pas le sens de l’humour ! » ou « on ne peut rien te dire !« . (C’est vrai aussi entre adultes !)
Faire de l’humour avec les enfants, quelles conditions pour que ça marche ?
Vous utilisez peut-être l’humour pour « piquer » votre enfant – et donc le faire réagir. Cela fonctionne là aussi à plusieurs conditions :
- la personne à qui vous destinez votre humour est en capacité de faire ce que vous lui demandez (pas toujours sûr avec les enfants, notamment si les émotions sont en jeu)
- la personne à qui vous destinez votre humour réagit positivement aux défi = « je vais lui prouver que je suis capable« . Si cette personne ne fonctionne pas bien sur ce mode, l’humour piquant a peu de chances de fonctionner (ça dépend des enfants)
- La personne à qui vous destinez votre humour peut se « défendre » : elle peut vous exprimer qu’elle n’apprécie pas votre humour, qu’elle a du mal à faire ce que vous lui demandez, qu’elle a besoin de votre aide, … On appelle ça méta-communiquer. C’est compliqué pour les enfants : ils doivent savoir identifier comment ils se sentent, faire le lien avec ce que nous avons dit (pas évident, notamment face au sarcasme qui piège même les adultes) … et surtout NOUS – les adultes – devons être en mesure d’accueillir la réaction de l’enfant sans couper court, sans le taxer de manque d’humour (hyper agaçant !!!), ni le dévaloriser ou contre-argumenter.
A noter que les mêmes conditions s’appliquent pour certaines traditions où on « ment » aux enfants (petite souris, Père Noël, oeufs de Paques déposés par les cloches, …). Ils ne poseront problème que si la relation pose problème par ailleurs.
Pour résumer, l’humour fonctionne bien dans le cadre d’une relation saine : l’intention n’est pas de dévaloriser ou diminuer l’autre, ni de prendre le pouvoir sur lui … et la méta-communication – pouvoir dire à l’autre l’effet produit sur nous par son attitude – reste possible tout le temps pour l’enfant.
Faire de l’humour avec les enfants est donc délicat et demande d’être très attentif à ce que vit l’enfant et à ce qu’il exprime.
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Quelques ressources pour aller plus loin au sujet de l’humour
Sur ce blog :
- passer un bon moment (et bien rire !) avec ses enfants : une petite vidéo qui vous montre comment déclencher un fou-rire immanquable !
- Le père Noël : faire croire ou ne pas faire croire ?
- La moquerie est-elle un problème ?
- Et tous nos articles sur l’éducation
Quelques livres au sujet de la communication (et de l’humour) (liens affiliés) :
Bonjour Sandrine!
Merci pour ce bel article, qui permet d’identifier les différentes formes d’humour.
Grande adepte de l’ironie, je « pratique » même avec les plus petits qui peuvent, savent (?) détecter, décoder très tôt une mimique, une posture ou un ton de la voix : il faut toutefois contrôler et savoir abréger, car les meilleurs blagues avec les enfants sont souvent les plus courtes!
J’aime la connivence, et beaucoup moins la raillerie et le sarcasme qui sont presque toujours blessants : ne faisons pas aux autres, etc.